Santé

Allô Giulia ? « Si je pouvais faire machine arrière, je ne deviendrais pas mère »

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« Chère Giulia,

J’imagine qu’on vous écrit surtout pour des histoires de couple, ou de sexe, ou quand on vous parle d’enfant, c’est pour vous dire qu’ils sont trop turbulents, ou qu’ils ne dorment pas, bref, qu’ils ont un problème… Moi, non. J’ai la chance d’avoir un petit garçon super mignon, gentil, rigolo, sociable – et qui a eu la bonne idée de faire ses nuits très vite. Vraiment, Naël est adorable. Je ne pouvais pas rêver mieux. Donc c’est vraiment moi le problème. En apparence, tout va bien, et honnêtement, les couches, les maladies, la crèche, je gère. Tout le monde me le dit, d’ailleurs : « pour un premier, tu te débrouilles super bien ! ». Ce que personne ne sait, c’est qu’au fond de moi, il y a un truc qui ne se passe pas. J’ai tellement honte, qu’il n’y a qu’ici que j’arrive à le dire : cet enfant, le mien, m’est étranger. Comme s’il était très loin de moi. Je n’ai jamais ressenti l’évidence dont tout le monde parle, l’amour absolu qui vous submerge et emporte tout… Moi, les soirées en amoureux, ça me manque. Le temps pour moi, il me manque – et je rêve de me faire une virée jusqu’à 4H du matin sans avoir à le payer le lendemain ! Le problème, c’est que dix-huit mois après ça naissance, il y a une forme de rancœur qui s’installe : c’est comme si je lui en voulais de lui voler ma vie. C’est affreux, non ?  J’ai honte de le dire, mais si je pouvais faire machine arrière, je ne deviendrais pas mère. » – Sarah, 30 ans

« Chère Sarah…

Wow. Tout doux… Et pour que les choses soient claires : il n’y a pas de « bons », ou de « mauvais » messages à m’envoyer. Tous témoignent de la confiance que vous me faites, et elle me touche. Tous me disent, surtout, que si tout le monde est plongé dans la fange, à un moment, à un endroit où à un autre de sa vie, certains, certaines – dont vous êtes, ont le courage de vouloir remonter à la surface, et la lucidité nécessaire pour poser les mots sur ce qu’ils ou elles traversent. Certes, ça ne fait pas tout, mais ça s’appelle un bon début. La suite, et pour que les choses soient plus claires encore, est celle-ci : l’instinct maternel est un gigantesque bullshit, transmis de génération en génération pour nous coincer à la maison. Femme tu es, mère tu seras, et, malgré tes nuits avoinées et / ou ton espace colonisé, tu aimeras ça. La vérité, Sarah, c’est que nous n’aimons pas toutes être mères. Ou pas toujours. Et que si vous réussissez à me trouver la sainte qui n’a jamais, jamais, jamais eu envie de rendre son enfant au magasin… Je la fais interner.

C’est dur, Sarah. C’est épuisant, et c’est même parfois douloureux d’avoir un enfant, tant ça bouleverse de choses très profondes en chacune de nous. Quand tout va bien, ça peut aussi être merveilleux, évidemment. Mais c’est une révolution, au sens propre du terme : cul par dessus tête. Notre place dans le monde a basculé, et, autour de nous, tous nos repères ont volé. On peut, bien sûr, retrouver l’équilibre… À condition de s’accorder du temps pour y arriver. À condition d’admettre, que, oui, c’est le bordel. Dans quelles conditions est arrivé Naël ? Qui étiez vous quand vous êtes devenue mère ? Quelle mère, quelle enfance avez vous eue ? Vous avez ces réponses en vous, Sarah. Allez les cherchez, elles vous aideront à faire sauter tous les verrous qui vous ferment la porte de la maternité – la vôtre, pas celle de la voisine. Accordez-vous d’en avoir marre, et laissez le lien, doucement, se tisser. Ça prend toujours du temps. Mais ça vaut le coup. En attendant, soyez sûre d’une chose : si vous étiez une mère si affreuse que ça, Naël ne serait pas le petit garçon qu’il est. Soyez fière de vous, Sarah. Je vous embrasse ! »

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