Santé

C’est mon histoire : « J’ai découvert la fessée »

« On aurait dit un acteur d’ »Alerte à Malibu » »

Je suis allongée sur le lino de ma chambre d’hôtel. Je suis nue, et j’ai hâte. Jim est debout, pas plus habillé que moi. De ses yeux, il m’intime de ne pas bouger. Il ne dit pas un mot, lui non plus ne bouge pas, il sait que je n’attends que ça. Il sait que mon plaisir, que notre plaisir viendra aussi de cette attente, de cette frustration-là. Ce soir, c’est lui qui décide. Lui qui donne le rythme. Lui, le maître : dans la main, il a une laisse. Au bout de la laisse, un collier, attaché à mon cou. Je suis soumise à Jim, je lui suis offerte. Et je sais que, quelques minutes plus tard, je jouirai comme jamais. Le souvenir de cette scène-là est étrangement net. Autant qu’il me semble fou. Jim et moi, Jim et la laisse, moi et mon collier, rien de tout cela n’aurait jamais dû se produire. Et pourtant, entre nous, dès les premières secondes, tout était si naturel…

La première fois que je l’ai vu, avec son débardeur rouge, ses gros muscles et ses grosses veines, j’ai pouffé : entouré d’une horde de pépettes en string, on aurait dit un acteur de la série «  Alerte à Malibu » avec ses fans. La mer, le sable, le soleil couchant, tout le décor y était… Je venais de me faire salement plaquer par Luc à quelques mètres de la mairie, tous mes projets de mariage, de famille ou d’enfants avaient été pulvérisés. Sev, qui aurait dû être mon témoin, a alors eu cette idée de génie : se tirer, toutes les deux, à Paros, en club de vacances, avec l’argent mis patiemment de côté pour la cérémonie. Moi qui ne jurais jusque-là que par les grandes marches dans les Cévennes, sac à dos et main dans la main avec mon amoureux, j’ai sauté de joie. J’avais envie d’ailleurs, dans tous les sens du terme. Luc était brillant. Élégant. Avec lui, j’allais tutoyer la finesse et le chic, j’en étais persuadée… Avec lui, je me suis vautrée dans le pathétique de l’infidélité. Donc j’ai foncé sur Jim, très rapidement jugé sportif, donc décérébré, donc sans danger pour moi. Ce que je n’avais pas prévu, c’est qu’il serait si doux. Et drôle. Et à l’écoute, comme Luc n’avait jamais su l’être. Ce n’est pas que je me laisse porter par l’ambiance du club, c’est que je décide de m’y plonger, et de toutes mes forces. Je suis de tous les cours d’Aquagym, de toutes les sorties en mer, de toutes les soirées – et la première pour me déguiser.

En coulisse, derrière la scène où se produisent mes camarades de jeux, un soir, Jim me prend la main. Il me sourit et il m’entraîne, un peu plus loin, sur le sentier qui mène vers la plage. J’aime le contact de ses doigts. J’aime qu’il ne me pose aucune question. J’aime qu’il n’ait pas l’air de s’en poser beaucoup non plus. Les bruits de la fête en sourdine, nous voilà tous les deux à marcher, le long du rivage. Le ciel est magnifique, Jim passe un bras autour de mes épaules, et se met à me raconter une histoire délirante sur des dieux grecs qui auraient inventé Paros pour s’y dorer la pilule. Son français est très approximatif (il est australien), et je ris comme je ne l’avais plus fait depuis ma rupture. Jim me fait du bien.

Un regard tendre mais ferme

Du bien, il va m’en faire encore plus, j’en ai la certitude, quand sa main attrape fermement mon visage pour le tourner vers le sien : il agrippe mes cheveux, me renverse la tête en arrière pour m’embrasser le cou, la nuque, les épaules et les lèvres. Il sait où il va, il sait ce qu’il veut, et j’ai ce sentiment étrange qu’il me connaît depuis mille ans – les dieux grecs, certainement. Je veux l’embrasser à mon tour, il pose un doigt sur mes lèvres : « shhhhh… Pas maintenant, babe, pas maintenant… » Dès le départ, les règles sont claires : Jim a pris le volant. Et ça aussi, c’est une découverte : Luc n’était pas très porté sur le sexe. Je pense que l’excitation intellectuelle suffisait largement à sa vie, et si je voulais, moi, ressentir un peu de plaisir charnel dans la mienne, je devais aller le chercher, faire des ronds de jambe pour le convaincre, me convaincre que c’était formidable, et me contenter de ce qu’il m’offrait. « Allonge-toi », dit Jim, et je m’exécute. « Déshabille-toi », poursuit-il, et j’en ai perdu mon short sur la plage. J’accède à toutes ses demandes, parce que son regard est aussi tendre que le ton est ferme. Parce qu’il sourit, et que son sourire est d’une douceur infinie. Parce que, lorsqu’il me fait l’amour, ce sont mes émotions qu’il guette, mes sensations qu’il devine : au fond, c’est moi qui le guide.

En confiance absolue, je me laisse aller, et je grimpe, je grimpe, je grimpe… Mais je me fige. La main de Jim vient de fouetter mon visage. Ça n’a pas brûlé, mais ça a piqué. Et c’est suffisant pour me faire atterrir, très brutalement. Il s’arrête immédiatement, me caresse la joue, se confond en excuses : « Sorry, babe, so sorry… » Jim s’allonge à côté de moi, et me prend la main. On ne dit plus rien. Mon coeur palpite. Le sang me monte à la tête. Mon ventre veut Jim, ma peau veut Jim, j’en redemande : « Again, please… » Jim me regarde, interloqué. Je prends sa main, et mime une gifle sur mon visage. « Are you sure ? » interroge-t-il. Oh que oui, je le suis : tout mon corps le réclame et j’ai décidé de laisser ma tête à Paris. Jim s’allonge doucement sur moi, me pénètre à nouveau, et je me laisse cette fois complètement aller là où il voulait m’emmener : dans un jeu de douce domination, dont j’ai pu voir qu’on pouvait sortir à n’importe quel moment, à l’instant où je le demandais. De (petites) gifles en (moins petites) fessées, on a fait l’amour toute la nuit et l’aube nous a cueillis, dans les bras l’un de l’autre, endormis sur le sable.

« À moi bandeau, pinces, cravache… »

Le soir même, on a recommencé. Et les soirées d’après aussi : j’avais quinze beaux jours devant moi pour explorer une terre qui m’était parfaitement inconnue. Sachant que ce qui se passait à Paros resterait à Paros, je m’autorisais tout. Au départ, Jim m’entraînait. Mais ce chemin érotique me réjouissait tellement qu’en quelques jours je l’avais pris de vitesse. Merci le XXIe siècle, merci Internet et merci les love stores en ligne : j’ai acheté une tapette en cuir, pour mes envies de fessée. Et puis une cravache, parce que, de temps en temps, c’était à moi de jouer. Un bandeau pour les yeux, des pinces pour les tétons, des culottes fendues, la fameuse laisse et le fameux collier… N’en jetez plus : pour la première fois de ma vie, j’avais envie, donc je faisais. Sans me préoccuper de ce petit juge intérieur qui nous punit toujours des pires peines de prison au moindre écart de conduite : je lui avais claqué le beignet, c’était jubilatoire… Et Jim s’en donnait à coeur joie.

Je pense que j’étais aussi loin de lui, dans la vie, que lui, de moi. Mais dans cet espace-là, celui du désir, celui du plaisir, nous nous accordions parfaitement. Quoi qu’on en dise, on sentait le temps filer, on savait, l’un et l’autre, que la fin de la récré allait bientôt sonner, alors on se dévorait. Deux fous furieux de sexe, d’amour et d’envie, que rien ne semblait pouvoir rassasier… Les vacances ont quand même pris fin. Sur le quai, j’avoue, j’ai eu la gorge serrée. Jim a planté ses yeux dans les miens. Une dernière fois, il a mimé une gifle sur ma joue droite. Cette fois-ci, ça m’a un peu griffée : c’était une (fausse) dent de requin, accrochée à une lanière en cuir. Cadeau d’adieu, ce pendentif qui m’avait fait sourire : mon surfeur en débardeur rouge m’avait sauvée de la noyade amoureuse.

Le naufrage de ma vie précédente était loin derrière moi. Avec lui, une porte s’était ouverte. Aujourd’hui, elle reste entrebâillée : je n’ai jamais recommencé, ni les fessées ni la cravache. Mais sait-on jamais…

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