Santé

Vous repoussez l’heure du coucher le soir ? Voici comment lutter contre la procrastination du sommeil

Scroller des vidéos sur TikTok, traîner devant une série Netflix, checker ses mails sur son téléphone… Vous est-il déjà arrivé de repousser l’heure de dormir, en vous adonnant à des activités sans réel intérêt ? Sachez que ce phénomène porte un nom : la « procrastination du sommeil », ou « revenge bedtime procrastination » en anglais.  

Cette habitude a été mise en lumière par la chercheuse et psychologue Floor Kroese, de l’université d’Utrecht aux Pays-Bas, dans la revue « Frontiers in Psychology » en 2014. « La procrastination du sommeil se caractérise par le fait de ne pas se coucher à l’heure prévue, alors qu’aucune circonstance extérieure ne le justifie », écrivent les auteurs de l’étude. Le scénario est souvent le même : allongées dans leur lit le soir, certaines personnes préfèrent sacrifier quelques minutes de sommeil pour des loisirs dont elles pourraient très bien se passer. Pourtant, le besoin de dormir se fait souvent ressentir à ce moment-là. Elles rejoignent alors les bras de Morphée, quelques heures après les premiers signes de fatigue. Un comportement intrigant, mais pas si surprenant. 

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Procrastiner pour prolonger la journée 

Selon les conclusions de ces travaux, la procrastination du coucher « semble être un problème répandu et pertinent, associé à un manque de sommeil ». Mais comment expliquer ce phénomène ? Cela est en partie lié à une notion de « vengeance ». En effet, « la procrastination du coucher par vengeance fait référence à la décision de retarder le sommeil en réponse au stress ou à un manque de temps libre plus tôt dans la journée », précise la « National Sleep Foundation ».

Ce comportement crée alors l’illusion d’une sorte de contrôle sur sa vie, à ce moment-là. Pourtant, passer quelques heures de plus sur un écran est loin d’être le meilleur moyen de solder sa journée. « Les gens veulent se débarrasser de l’émotion sans résoudre le problème, explique Nicolas Neveux, psychiatre à Paris et auteur du livre  » Prendre en charge la dépression avec la thérapie interpersonnelle« . C’est la raison pour laquelle il faut les aider à se centrer sur la problématique, et non sur l’émotion qui n’est autre qu’un signal d’alarme. »  

« C’est une manière de rester dans une sorte de bulle, de sanctuaire un peu tranquille, sans penser à ce qui nous embête le reste du temps. » 

Aussi, ce phénomène est dû au fonctionnement de l’esprit humain, qui a tendance à prioriser le plaisir à court terme, plutôt que les bénéfices à long terme », indique le médecin. « Regarder un film le soir, bien qu’il ne soit pas passionnant, permet de nous capter suffisamment, de manière à oublier la réalité. C’est une façon de rester dans une sorte de bulle, de sanctuaire un peu tranquille, sans penser à ce qui nous embête le reste du temps. Ces deux facteurs sont liés au même mécanisme : les gens procrastinent pour prolonger leur journée, soit parce qu’ils ont l’impression de ne pas avoir terminé quelque chose, soit parce qu’ils refusent d’être au lendemain, ajoute Nicolas Neveux. On peut combattre ce mécanisme, mais cela nécessite une action volontaire et est loin d’être évident. »

D’autant plus que la procrastination du sommeil concerne souvent les personnes qui ont du mal à s’autoréguler de façon générale, selon l’étude menée par Floor Kroese. Les étudiant·es et les femmes seraient également plus susceptibles de retarder l’heure du coucher, indique la Bibliothèque nationale de médecine aux États-Unis. Néanmoins, se pencher sur cette problématique est important, pour préserver sa santé mentale et physique. 

Des risques pour la santé 

Contrairement aux idées reçues, le fait de se détendre dans son lit, sans dormir, est loin d’être suffisant pour recharger les batteries. « Pour se reposer, il faut que le cerveau soit en état de fonctionnement minimum. C’est là que les neurotransmetteurs peuvent se reconstruire », souligne Nicolas Neveux. La procrastination du coucher peut alors avoir des conséquences multiples sur la santé. « Le fait de laisser passer le petit train du sommeil le soir fait que l’on n’arrive plus à s’endormir au moment où on l’a décidé, poursuit le médecin. Ce ne sont pas les rythmes socio-environnementaux qui doivent dominer, mais le rythme biologique. Il faut accepter de s’adapter aux besoins du corps. »  

La procrastination du coucher entraîne une privation de sommeil, en empêchant le corps et l’esprit de se recharger correctement, avec une irritabilité liée à la fatigue le lendemain. Cela comporte également des risques à long terme : dégradation de la réflexion, de la mémoire et de la prise de décision, somnolence diurne, ce qui peut nuire à la productivité ou encore à la réussite scolaire. Des troubles de la santé mentale, tels que la dépression et l’anxiété, peuvent également apparaître. Alors, comment lutter contre ce comportement ? 

Écouter son corps  

Nicolas Neveux attire l’attention sur un autre point : « Si l’on procrastine, c’est probablement que quelque chose nous fait souffrir. Il faut alors se demander quel est le problème dissimulé, ne pas être dans l’évitement ou dans la fuite », signale-t-il, avant de poursuivre : « Si l’on ne parvient pas à identifier ce qui nous tracasse, et que l’on ne se sent pas bien, mieux vaut ne pas aggraver la situation en créant une dette de sommeil. Je conseillerais d’aller dormir quand le corps le demande, en se disant que l’on regardera la suite de sa série le lendemain. » 

« Le tout est de s’adapter au contexte et à son état du moment. » 

Selon le médecin, il est essentiel d’écouter son corps pour identifier les signes de fatigue, et fermer les yeux dans le but de s’endormir, à ce moment-là. « Parfois, le sommeil se fait ressentir à 21h30, ce qui peut nous sembler trop tôt pour aller se coucher. Dans ce cas-là, il faut se poser les bonnes questions, avant d’ignorer, ou non, ce premier train du sommeil. Si l’on est certain de ne pas avoir de dette de sommeil, on peut se permettre d’attendre le prochain cycle (l’heure suivante, par exemple). En revanche, si l’on travaille comme un·e acharné·e, sans avoir pris de vacances depuis six mois et que l’on est au bord du burn-out, il peut être judicieux d’aller se coucher. Le tout est de s’adapter au contexte et à son état du moment. »   

Routine nocturne  

La « National Sleep Foundation » recommande, quant à elle, de mettre en place une routine nocturne, basée sur une hygiène de vie saine. Ainsi, ces comportements bénéfiques pour la santé, pourraient devenir des automatismes : maintenir une heure de coucher et de lever constante, y compris le week-end ; éviter l’alcool et la caféine en fin d’après-midi ou en soirée ; stopper l’utilisation des appareils électroniques au moins une demi-heure avant d’aller au lit. 

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