Santé

C’est mon histoire : « Notre rencontre a été une succession de coïncidences »

ÉDOUARD

Je me souviens de la date, nous sommes le 12 juin 2020. Je suis dans ma voiture avec « Lucrèce Borgia », mon opéra préféré, à fond. C’est la fin du prologue, magnifique, et je profite de m’être garé pour l’écouter tranquillement en jetant un oeil à Facebook. Je viens de recevoir une nouvelle « demande d’ami ». La fille s’appelle… Lucrèce. Un sacré concours de circonstances ! Je ne la connais pas, mais je vois ses  cheveux roux et sa peau laiteuse. Tout ce que j’aime. Je lui écris : « Merci pour l’ajout. Enchanté. Est-ce qu’on se connaît ? » Ce à quoi, elle répond : « Non, mais c‘est dommage. Le seul hic c’est que tu portes le même prénom que mon père. C’est quoi ton deuxième prénom ? Le mien, c’est Saskia, au cas où tu n’aimerais pas Lucrèce. » Je lui renvoie la longue liste de mes prénoms et je termine quand même en lui disant que j’étais en train d’écouter Lucrèce Borgia au moment où elle m’a envoyé sa demande. Elle rétorque : « Le hasard fait bien les choses. Et Édouard, c’est très bien. »

 À l’époque, je suis célibataire, j’ai rompu juste avant le Covid – une relation qui battait de l’aile – et j’en ai vraiment soupé du  confinement. Bref, je suis disponible. Je lui donne rendez-vous le lendemain pour prendre un verre devant le théâtre de l’Odéon. À peine assis, ce qui me bluffe immédiatement, c’est son sens de l’humour, son naturel déconcertant. Sans filtre. Alors qu’on vient juste de se rencontrer, on se marre sans arrêt. Bon, il faut dire aussi qu’on enchaîne les verres. On parle de tout, de rien, et de nos névroses ! Le flot est intarissable. Puis, on décide d’aller dîner. On va au restau Chez Huguette. C’est le prénom de ma grand-mère, deuxième coïncidence ! Et il y en aura d’autres… Elle habite au 9, rue Jacob, j’habite au 9, rue du Dôme.

J’ai eu la certitude qu’elle était la femme avec qui j’aurais des enfants

On trouve des échos dans tout ce qu’on se raconte. J’adore le théâtre et le cinéma, elle est comédienne, on est tous les deux fans de Terrence Malick. Mieux, elle me raconte qu’elle a joué dans la pièce « Démons » de Lars Norén. Je voulais aller voir cette pièce jusqu’à ce que je laisse tomber car dans la bande-annonce les comédiens interpellaient le public et que je n’avais pas envie que ça tombe sur moi ! Le lendemain de cette soirée, je lui dis que je pars pour  Arles écrire un scénario et qu’elle est la bienvenue. Elle décide de venir quarante-huit heures. « Je serai dans le coin », me dit-elle.

Certes, elle est dans les parages mais il faut quand même le faire, retrouver un homme qu’on connaît à peine, qu’on a seulement embrassé un soir. Je trouve ça très romanesque. La plupart des gens mettent des formes, elle, elle y va, pour tout. À Arles, on passe notre première nuit ensemble. Intense. Il y a aussi un truc avec son rire, magnétique. Il me renverse, et on l’entend à des kilomètres. Même les gens se retournent. Moi qui suis à la fois très sociable et très timide dans certaines situations, c’est habituellement le genre de choses qui me gênent, mais pas là, au contraire. Après Arles, on a chacun prévu nos  vacances, alors on ne se revoit qu’en septembre. Plus on sort ensemble, plus on s’aperçoit des liens improbables qu’on a en commun.

Tout arrive comme une confirmation de cette relation, jusqu’à ce truc dingue quelques mois plus tard. Je dois sélectionner des images pour présenter un concours de photographie et je demande à Lucrèce de m’aider à choisir. Les photos défilent sur mon écran jusqu’à celle d’un couple qui s’embrasse à une terrasse de café. On voit à peine leurs visages. Je l’ai prise en octobre 2017. J’adore cette photo, et à l’époque je l’avais même envoyée sur le WhatsApp familial avec ce commentaire : « Tout le bonheur du monde. » L’image passe et elle me demande de revenir en arrière. « C’est drôle, me dit-elle, j’ai la même jupe, et tout à coup elle ajoute, mais c’est moi ! » Elle était avec son ex. À ce moment, je ne vois qu’un signe de plus, mais celui-ci était encore plus énorme que les autres. En fait j’ai eu la certitude qu’elle était la femme avec qui j’aurais des enfants.

LUCRÈCE

J’arrive chez une de mes meilleures amies un soir de juin 2020 avant d’aller à un anniversaire. Nous sortons du confinement et, depuis, je suis dans un mood de fête ! D’autant que je viens de vivre une rupture un peu difficile et que j’ai vraiment envie de m’amuser. Ma copine me montre un garçon sur Facebook – il vient de lui souhaiter son anniversaire – et elle me pousse à lui envoyer une demande d’ami. Elle ne le connaît pas bien mais sa soeur lui a dit qu’il était génial. Je regarde, il est mignon mais pas mon genre. Trop minet pour moi, je suis plutôt genre  testostérone. Elle insiste, et après deux verres de rosé, je lui envoie une demande.

Dix minutes plus tard, il répond. Bref, l’état des mecs après le confinement : au taquet ! On continue à s’écrire toute la soirée jusqu’à ce qu’il me propose de nous voir le lendemain. J’accepte, même si je n’en ai rien à cirer. Quand je me réveille le matin avec la gueule de bois, j’y vais en traînant les pieds. Le café est blindé, je ne sais pas où il est. Je l’appelle. Il me répond : « J’ai une chemise rayée rouge et blanc, ou le contraire. » Sa phrase m’amuse. Il se lève, je le rejoins.

Au bout de cinq minutes, il me fait marrer. Mais ce n’est pas tout, je suis comédienne et il connaît le théâtre par coeur. Il me parle même d’une pièce qu’il devait aller voir dans laquelle je jouais – l’histoire d’un couple qui se déchire. Et là je me dis, quand même c’est fou, c’était dans un tout petit théâtre et s’il était venu, c’est sûr, je l’aurais vu. En sortant du dîner – on avait pas mal bu – , il m’a embrassée, mes pieds ont décollé du sol ! J’ai été cueillie en une soirée. C’était d’autant plus dingue que depuis ma rupture, je n’arrivais plus à tomber sous le charme d’un homme. Il me propose de venir chez lui. En vrai, j’en crève d’envie mais il me plaît et comme je veux le revoir, je dis : « Non. » Stratégie.

Lui et moi c’était une évidence

Il me raccompagne devant ma porte, je me revois encore sur mon balcon en train de fumer une clope en me disant « aïe, je suis amoureuse ». Dans la nuit, il m’envoie un message et m’écrit qu’il a passé une super soirée et le lendemain un autre message : « J’ai loué une maison d’hôtes, est-ce que tu viendrais me rejoindre ? » J’ai attendu deux heures avant de répondre. Il se trouve que j’étais dans le Sud la semaine où il m’invitait et j’ai dit O.K. Mais seulement deux jours, pas question d’être trop lourde ! Évidemment, d’un côté j’ai peur, et de l’autre, je suis surexcitée. 

Après ces quarante-huit heures ensemble, je me dis que si je ne revois pas ce mec, je ne comprends plus rien parce que c’est génial. Je suis totalement séduite par le décalage entre le côté propre sur lui, qui se dégage au premier abord, et, dès qu’il parle, sa drôlerie, sa sensibilité, son côté cash. Et puis, il y a un truc qui ne trompe pas : tout de suite, je me sens hyper à l’aise avec lui. C’est fluide. Je crève d’envie de lui envoyer des messages toutes les cinq minutes mais je me retiens, et je le laisse venir à son rythme. Je veux bien manoeuvrer, d’autant que pendant notre premier dîner, il m’a quand même balancé : « Je suis très compliqué et mes relations sentimentales sont une catastrophe. »

Moi ça m’est égal, il me plaît et ça marchera un point c’est tout. D’ailleurs, on se voit de plus en plus, surtout depuis le deuxième confinement. Et puis un jour, il y a cet événement improbable. Il me montre des photos pour un concours qu’il passe et, devant un couple qui s’embrasse, je m’exclame : « Cette photo est trop belle, j’aurais tellement aimé que ce soit… » Je m’arrête avant de dire « nous » au moment où je comprends que, sur la photo, c’est moi. Il me regarde : « Qu’est-ce qu’il y a ? » et je lui réponds que je viens de me reconnaître. On s’est tus tous les deux pendant un quart d’heure. J’étais tellement émue. L’homme dont j’étais tombée amoureuse m’avait déjà vue. Ça a conforté l’idée que lui et moi c’était une évidence.

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