Santé

Émilie (49 ans) et Gérald (56 ans) : « Ma passion a pris le dessus sur ma vie de famille »

Émilie et Gérald, 49 et 56 ans, sont en couple depuis près de 25 ans et ont ensemble deux enfants adolescents. Émilie, pharmacienne, est encore très amoureuse de Gérald, entrepreneur dans le bâtiment. Pour ces deux-là, il n’a jamais été question de se quitter, même malgré les différentes épreuves de la vie.

Mais Gérald avoue que son couple a traversé une zone de turbulences ces trois dernières années : «  Après le confinement, Émilie s’est mise à courir dès qu’elle pouvait. C’était sa manière de gérer son stress et de profiter de l’extérieur. Au départ, c’était juste une heure de temps en temps. Très vite, au fur et à mesure où elle prenait de la confiance et où ses capacités se sont mises à se développer, elle a commencé à courir une fois tous les deux jours. Au bout d’un an, c’était au moins une fois par jour et pendant un peu plus d’une heure. Je ne lui en ai pas voulu d’avoir une passion, mais ça a pris trop de place dans nos vies. »

Gérald trouve que l’activité sportive de sa femme est envahissante : « Elle courait chaque soir après le travail donc elle rentrait assez tard. Ensuite il y avait les étirements et puis la douche. On mangeait très tard et elle ne voyait presque pas ses fils. Elle ne parlait presque plus que de ça : de ses performances, des courses qu’elle voulait faire, de ses projets de marathon. Évidemment, tout ça c’était sur notre temps de week-end. J’avais l’impression qu’elle était obsédée par ça. Et ce n’est pas comme si le sujet m’intéressait. Je voyais nos fils le vivre mal, je le vivais mal, alors j’ai décidé de lui en parler. Au départ, elle n’a pas compris que c’était un mal-être sérieux. Mais elle a fini par comprendre. Je ne me suis jamais énervé mais j’ai mis le sujet sur la table plusieurs fois. On n’avançait pas. Alors c’est elle qui a proposé la thérapie de couple. »

Quand communiquer est la clé

Gérald est étonné de la facilité avec laquelle le dialogue s’est imposé : « C’était très différent de nos discussions à la maison. J’ai l’impression que c’était plus facile de parler avec quelqu’un dans la pièce et qu’en même temps on faisait vraiment un effort pour s’écouter, comprendre l’autre. C’est vraiment ça qui nous a permis d’aller mieux en tant que couple. C’était tout ce qu’il nous fallait. Bien sûr que j’aurais aimé qu’Émilie comprenne par elle-même que ce n’était pas vivable pour nous. Mais son geste pour qu’on retrouve un équilibre a quand même fait toute la différence. »

En thérapie, Émilie comprend que sa passion prend une place dévorante dans son quotidien : « Je prenais du plaisir à courir mais c’était aussi une fuite dans mon quotidien. Après le confinement avec des ados à la maison, j’avais besoin de voir ailleurs et de temps pour moi. Alors je me suis mise à courir. Et après, je me sentais plus capable de passer autant de temps à la maison qu’avant, à gérer autant de trucs qu’avait. Quand j’allais courir, c’était Gérald qui gérait les courses, la préparation du dîner et les lessives. Je ne le faisais pas consciemment mais je finissais de courir pile quand il fallait venir dîner. Après ma douche, je n’avais qu’à me mettre les pieds sous la table. Passionnée par ce que je faisais et fière aussi de dépasser mes limites, je ne me suis pas rendu compte que je ne parlais que ça et que je m’intéressais plus autant aux hommes de ma vie. C’est un peu triste avec le recul et quand j’en ai pris conscience je me suis sentie coupable. J’ai une tendance à faire les choses à 200 % donc si j’avais eu cette prise de conscience toute seule, j’aurais sur-performé à la maison jusqu’à m’épuiser encore. C’est le psy qui m’a permis de me rendre compte que je marchais toujours de la même manière et que c’était assez toxique pour mes proches. »

J’ai l’impression de faire quelque chose d’important et qui va m’apporter du positif pendant longtemps

Émilie court encore mais de façon plus mesurée : « Je cours environ deux fois par semaine et j’évite de trop enchaîner les courses le week-end. Je pense que la conclusion de tout ça ce n’est pas que c’est négatif de faire du sport mais bien que ce soit important de trouver un équilibre et de comprendre pourquoi on fait les choses dans l’excès. Après la thérapie de couple, qui a duré quelques mois, j’ai commencé une thérapie toute seule. Je pense que j’en avais besoin. J’avais trouvé un équilibre dans mon couple et dans ma vie de famille mais j’avais besoin de trouver un équilibre avec moi-même. Et aussi, j’avais peur de recommencer à faire n’importe quoi. Je ne me faisais plus confiance. La thérapie que j’ai commencé avec un autre psy va prendre du temps mais j’avance. J’ai compris des choses sur la façon dont j’ai été éduquée, la façon dont mes premières relations amoureuses se sont passées. Regarder le passé, c’est aussi une façon de grandir et d’être une meilleure personne. J’ai tendance naturellement à aller vers la fuite en avant. Ça m’a fait du bien de prendre le temps de réfléchir sur moi et de chercher à me comprendre. Je pense même que ça me fait me rendre plus fière encore que la course. J’ai l’impression de faire quelque chose d’important et qui va m’apporter du positif pendant longtemps. Ce n’est pas toujours facile mais c’est le positif qui reste. »

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