Santé

Meurtre de Lola : « Ma fille ne veut plus aller seule au collège »

« Ma fille est en 6e à Georges-Brassens. Les choses ont très vite été prises en charge par la proviseure et l’association des parents d’élèves : on a reçu un mail le samedi pour nous prévenir qu’une petite fille de 5e était décédée. Tout le monde n’avait pas fait le lien avec Lola. C’est venu plus tard, certains adultes avaient vu le message Facebook de ses parents au moment de sa disparition. Bien sûr, on se pose la question d’en parler à son enfant, tout en sachant que dès le lundi cela allait être au cœur de toutes les discussions. Au collège, une association spécialisée dans la prise en charge des ados confrontés à des traumatismes nous a transmis des conseils. L’association des parents d’élèves a annoncé la mise en place d’une cellule d’écoute. Elle nous a aussi avertis qu’il y aurait une présence policière devant le collège, ainsi qu’une brigade mobile d’assistants d’éducation pour protéger les enfants, notamment vis-à-vis des journalistes, pour qu’ils ne soient pas importunés.

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Faire attention aux fake news 

La médiatisation est difficile à gérer. Les réseaux sociaux, les chaînes info ont participé à la montée de la psychose, à la propagation de rumeurs. Celle du trafic d’organes a beaucoup impressionné ma fille. Dès le lundi, la prof d’histoire a fait un cours sur les fake news et la vérification de l’information pour aider les enfants à faire le tri. Ma fille a beau être très protégée – nous n’avons pas de télé, elle n’a pas de smartphone –, elle a très vite appris que Lola avait été assassinée. Elle connaît certains détails, mais pas tous. C’est plutôt le mobile qui l’interroge : comment peut-on tuer quelqu’un ? Elle essaie de comprendre le déchaînement de la violence. Elle craint qu’à l’école l’ambiance change. Les enfants réagissent de manières très différentes : certains sont très tristes, apeurés, d’autres restent ancrés dans leur quotidien, font des blagues ou jouent à provoquer. Ma fille, elle, ne veut plus aller seule au collège pour l’instant. Elle ne parle pas tant que ça de Lola, mais elle angoisse si j’ai cinq minutes de retard, si elle perd de vue sa petite sœur… Les parents se posent des questions : combien de temps dure l’état de choc ? Quand laisser les enfants aller à nouveau seuls au collège ? On nous a dit qu’il pourrait y avoir une deuxième phase plus longue pour eux, que certains risquent encore de faire des cauchemars, de ne plus vouloir aller à l’école.

Une école endeuillée 

C’est très compliqué de ne pas transmettre ses propres peurs à ses enfants. En tant que parent, on fait son travail pour les mettre dans un cocon. À l’adolescence, on écarte un peu l’armure, on leur donne de l’autonomie, et puis il y a l’intrusion de cette violence extrême. Pour la rassurer, je lui dis que c’est hyper rare. “La preuve, le ministre de l’Éducation et Anne Hidalgo sont venus au collège !” Comme la meurtrière présumée est algérienne, tous les parents ont aussi en tête la récupération politique. C’est un collège d’une grande mixité et très ouvert, qui accueille des enfants porteurs de handicaps ou en difficulté. Or, très vite, on a vu des choses vraiment problématiques. Une photo d’un ami de Lola qui se recueillait devant son immeuble a été utilisée par un réseau d’extrême droite. Éric Zemmour a directement acheté le nom de domaine justicepourlola.fr. On a tous peur que l’image de nos enfants soit instrumentalisée par l’extrême droite. Toute cette agitation et cette nouvelle forme de violence empêchent les enfants de faire leur deuil, de s’apaiser. On espère que tout cela va se calmer, pour la famille de Lola avant tout. »

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