Santé

Sommeil polyphasique : dormir plusieurs fois en journée, est-ce utile ?

Un nourrisson qui dort 14 à 18 heures par jour pratique le « sommeil polyphasique » sans le savoir : il dort en plusieurs périodes, tout au long de la journée et de la nuit. En grandissant, ses siestes vont se réduire de plus en plus et son sommeil va devenir progressivement monophasique c’est-à-dire d’un seul bloc, la nuit.

Certains adultes, cependant, retrouvent un sommeil polyphasique. Les travailleurs de nuit, par exemple, sont obligés de faire des siestes au cours de la journée pour avoir suffisamment de sommeil. Autre exemple : certains insomniaques tentent de rattraper leur nuit en dormant davantage le jour. Enfin, des sportifs de haut niveau, comme les navigateurs en solitaire ou les ultra-traileurs (ces coureurs de l’extrême en montagne), doivent fractionner leur sommeil à toute heure du jour ou de la nuit afin de rester vigilants et performants pendant la compétition. 

L’organisme est perturbé par le sommeil polyphasique

Qu’il soit subi ou choisi, le sommeil polyphasique reste contre-nature. Nous ne sommes pas programmés pour dormir le jour et nous agiter la nuit. Au contraire, notre horloge biologique, nos sécrétions hormonales, nos rythmes circadiens veille/sommeil sont calés sur la lumière naturelle et nous incitent à dormir la nuit, dans le noir. Aller à l’encontre de ce cycle naturel perturbe l’organisme. On peut l’admettre pour un sportif le temps d’une course. Mais ce sommeil fractionné est plus problématique sur une longue durée car il peut avoir des conséquences sur la santé physique et mentale (augmentation du risque d’obésité, de diabète de type 2, de dépression… ).

Sommeil polyphasique : un signe d’alerte

Si vous ressentez un besoin irrépressible de dormir en journée, posez-vous les bonnes questions ! Benoît Mauvieux est enseignant-chercheur en physiologie des environnements extrêmes à l’université de Caen. Il a notamment participé au projet scientifique Deep Time au cours duquel 15 volontaires ont passé 40 jours dans une grotte en 2021, hors du temps. Pour lui, ce sommeil polyphasique doit être perçu comme « un signe d’alerte » : « Si vous avez besoin de faire une ou plusieurs siestes dans la journée, vous êtes en manque de sommeil. Soit votre sommeil est trop court, soit il est de mauvaise qualité. Il faut en comprendre la raison », explique-t-il. 

En dehors des horaires décalés par un travail posté, des gardes ou des interventions de nuit, les causes peuvent être multiples. Par exemple, des bruits gênants (ronflements, trafic routier, ronronnements du chat…) vous empêchent de plonger dans le sommeil profond, le plus réparateur. Comprendre la cause va permettre de la corriger ou de la traiter s’il s’agit d’une maladie comme le syndrome d’apnée du sommeil.  

Comment profiter d’une sieste sans entamer le sommeil de la nuit ?

Quelle qu’en soit la cause, le manque de sommeil vous pousse à dormir pendant la  journée. Benoît Mauvieux admet que de courtes siestes peuvent aider à récupérer : « C’est mieux que rien mais, sur le plan chronobiologique, ça ne vaut pas une bonne nuit de sommeil. »

La période pendant laquelle tout nous incite à dormir (la fatigue de la journée, l’absence de luminosité, les signaux hormonaux, la baisse de la température corporelle…) se situe entre minuit et cinq heures du matin. C’est là qu’on récupère le mieux sur le plan physique et cérébral. Une autre fenêtre d’endormissement s’ouvre naturellement en début d’après-midi, en pleine digestion. 

Dans ces créneaux-là (nuit profonde et début d’après-midi), le sommeil est véritablement récupérateur. 

En dehors de ces périodes, il vaut mieux éviter de s’assoupir. « Je conseille en particulier aux seniors qui dorment mal la nuit de s’exposer à la lumière naturelle au cours de la journée et d’avoir une activité physique, plutôt que de faire la sieste au mauvais moment », explique Benoît Mauvieux. La lumière et la dépense énergétique vont les aider à recaler leurs rythmes biologiques.

Dans tous les cas, il vaut mieux éviter une sieste trop tardive, en fin d’après-midi : « elle risque de détériorer la qualité du sommeil de la nuit. On entre alors dans un cercle vicieux », observe Benoît Mauvieux.

Sieste : le plus court sera le mieux

Dans l’idéal, cette sieste ne devrait pas dépasser 30 minutes. Il est même conseillé de programmer une alarme pour pouvoir se réveiller. « Une petite sieste, au bon moment, permet de recharger un peu ses batteries. Le gain se mesure en termes de performance et de productivité. Pour certains métiers, c’est aussi une question de sécurité », admet le chronobiologiste. 

Exceptionnellement, en cas de fatigue extrême, on peut s’offrir une sieste « royale » de 90 minutes correspondant à un cycle complet de sommeil avec toutes ses phases (sommeil lent, profond et paradoxal). « Vous allez récupérer dans une certaine mesure, mais vous risquez de vous réveiller complètement vaseux. La sieste ne doit pas se substituer au sommeil de la nuit », rappelle le spécialiste. 

À toutes celles et ceux qui pratiquent le sommeil polyphasique par choix ou sous la contrainte, Benoît Mauvieux rappelle que le sommeil est « un investissement », jamais du temps perdu. Dans la mesure du possible, il faut veiller à ne pas le perturber : « Avec l’alimentation et l’activité physique, le sommeil est l’un des piliers de notre santé. »

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