Une étude dévoile le temps qu’il faut passer seul(e) pour ressentir la solitude

Tout un chacun aura pu s’en rendre compte, on peut être seul sans éprouver un sentiment de solitude. Mais au bout de combien de temps le fait d’être seul se traduit-il par un sentiment de solitude ? Au bout de combien de temps la solitude physique, autrement dit le fait d’être tout seul un moment, aboutit à une solitude morale ?

Des chercheurs américains ont apporté des réponses à ces questions dans une nouvelle étude, à paraître dans le numéro de décembre 2023 du Journal of Research in Personality (Source 1).

Ils révèlent que le temps que l’on passe seul n’est pas étroitement corrélé au sentiment de solitude, et qu’il faut passer 75 % de son temps seul pour ressentir une solitude morale. Par ailleurs, le sentiment de solitude dépend aussi de l’âge : il n’y aurait aucun lien entre isolement et solitude pour personnes ayant moins de 40,4 ans, cet âge étant comme un “point de bascule”. Au-delà de cet âge, le lien entre isolement et solitude serait significatif. “Chez les adultes de 68 ans et plus, nous avons constaté que la solitude est fortement liée à l’isolement social”, a déclaré David A. Sbarra, coauteur de l’étude, dans un communiqué (Source 2).

Pour les chercheurs, il se pourrait qu’il en soit ainsi du fait que les personnes âgées perçoivent différemment l’isolement des personnes plus jeunes. “Le réseau social des personnes diminue à mesure qu’ils vieillissent, et la capacité de passer du temps avec les autres diminue pour de nombreuses personnes âgées”, ce qui créerait ce sentiment de solitude, a indiqué David Sbarra. Autre différence générationnelle qui expliquerait ces résultats, l’usage des réseaux sociaux, donnant aux plus jeunes la possibilité de socialiser à distance, et de diminuer leur solitude même lorsqu’ils sont physiquement seuls chez eux. Le manque d’activité sociale des personnes âgées, du fait de la retraite, de leur lieu de vie ou encore de leurs capacités motrices, aurait également un rôle à jouer dans l’émergence du sentiment de solitude, du fait du “manque d’opportunité de socialisation”.

Dans l’ensemble, les participants à l’étude ont passé 66 % de leur temps seuls, et ceux qui étaient seuls pendant plus de 75 % de leur temps étaient ceux qui faisaient le plus part d’un sentiment de solitude. En analysant les résultats de l’ensemble du groupe de participants, il n’y avait qu’un chevauchement de 3 % entre le fait d’être seul et la solitude morale.

L’étude a impliqué plus de 400 participants, avec des données d’archives collectées dans une série d’études réalisées au cours des 20 dernières années. L’équipe de recherche a ici utilisé une méthode, nommée enregistreur activé électroniquement, ou EAR, une application pour smartphone qui enregistre, avec l’accord des utilisateurs, les sons qu’ils émettent, et ce pendant 30 secondes toutes les 12 minutes.

De sorte que “nous savons si la personne est au téléphone, si elle conduit, regarde la télévision ou si elle interagit avec un partenaire ou un inconnu”, a commenté Matthias R. Mehl, coauteur de l’étude. Mais si cette approche a de nombreux avantages, elle est assez chronophage pour les chercheurs qui doivent écouter des heures et des heures d’enregistrement. C’est pourquoi l’équipe travaille à la mise en place d’une application via une montre intelligente, à la manière des trackers de fitness qui comptent nos pas ou notre activité physique.

Notons que l’Organisation Mondiale de la Santé prend la thématique de la solitude très au sérieux, puisqu’elle a annoncé, dans un communiqué daté du 15 novemvbre 2023, la création d’une commission dédiée à ce sujet. La solitude est en effet associée à un risque accru de développer diverses maladies, dont la démence ou la dépression.