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Tiffany, 34 ans : « L’ombre de mon père plane sur mes relations amoureuses »

« Petite, je vouais déjà une admiration sans bornes à mon père, lâche d’emblée Tiffany. Je le trouvais grand, beau, fort, drôle, intelligent, cultivé… Bref, il avait, à mes yeux, toutes les qualités. Rien à voir avec les pères de mes copines. Il faut dire que papa était commandant de bord. Il portait un galonnage à quatre barrettes qui m’impressionnait énormément. D’autant que son copilote n’en avait que trois. Quand il rentrait d’un vol long-courrier, il rapportait plein de cadeaux extraordinaires et avait mille choses incroyables à raconter. Je voyais bien que tout le monde, autour de moi, le regardait avec fascination et ça, ça me plaisait par-dessus tout. J’étais trop fière ».

Éblouie par celui qui lui a donné la vie, cette dentiste de la région parisienne reconnaît avoir toujours entretenu une relation fusionnelle avec lui. « Quand il était à la maison, j’étais constamment scotchée à ses basques, raconte-t-elle. Un vrai pot de colle. Je crois qu’il n’y a pas une seule de photo de famille dans les albums où, même à un âge déjà relativement avancé (je dirais dix ou douze ans), je ne suis pas agrippée à son bras, à ses jambes, voire assise sur ses genoux. Mes deux sœurs aînées se tenaient, elles, toujours à distance de notre duo père-fille. Elles étaient (et sont encore) plus proches de ma mère, une femme discrète, effacée, tout en retenue, qui leur ressemble davantage. Une maman que j’aime aussi, bien entendu, mais différemment ».

La trentenaire concède aussi que son père, sans doute peu au fait des dégâts que pouvait provoquer une telle relation sur la vie sentimentale de sa benjamine, n’a jamais vraiment cherché à la tenir à distance. « J’étais clairement sa préférée, concède-t-elle. Je ne m’en rendais pas du tout compte à l’époque (et personne, à la maison n’a jamais soulevé ce point) mais, avec le recul, c’est plus qu’évident. Il avait parfaitement compris que je l’idolâtrais, qu’il était mon héros, et, inconsciemment, il en rajoutait, en me couvrant d’attentions, de compliments et de câlins (beaucoup plus qu’il ne le faisait avec mes sœurs, même si, bien entendu, il ne les ignorait pas non plus). Une chose est sûre : je me suis toujours sentie valorisée par lui. Ce qui ne l’empêchait pas de savoir faire preuve d’autorité à mon égard, lorsque c’était nécessaire. Je crois que je le craignais autant que je le vénérais. En son for intérieur, il devait se sentir terriblement flatté d’être le centre de mon univers ».

Je ne pourrais pas envisager de passer ma vie aux côtés d’un homme qui ne conviendrait pas à mon père

Tiffany a aujourd’hui pris son envol, mais elle admet que l’ombre de son père continue à planer sur sa vie. « Dès que j’ai le moindre doute ou la plus petite hésitation, c’est plus fort que moi, il faut que je décroche mon téléphone pour lui demander ce qu’il en pense et ce qu’il ferait s’il était à ma place, glisse-t-elle. Il est évident que je n’ai jamais réussi à me détacher de lui. Mon père est celui à qui je peux tout dire et aussi celui qui, dans mon esprit, a forcément la solution à tout. Il sait m’écouter et me conseiller mieux que quiconque ». La trentenaire ne cache pas que l’ombre paternelle plane aussi fortement sur ses relations amoureuses, qu’elle décrit elle-même comme « un fiasco ».

« Je ne peux pas m’empêcher de rechercher des hommes qui ressemblent à mon père, aussi bien physiquement qu’intellectuellement, explique-t-elle. Mais ce n’est pas tout : il faut aussi qu’ils répondent aux critères que lui a fixés pour moi – il a toujours dit qu’il voulait que j’épouse quelqu’un qui a des valeurs et qui, surtout, ne me manque pas de respect -, car je ne pourrais pas envisager de passer ma vie aux côtés d’un homme qui ne conviendrait pas à mon père. C’est absolument essentiel pour moi qu’il me donne son approbation et qu’il valide mes choix, en particulier amoureux. Évidemment, c’est difficile, voire quasiment impossible, de trouver toutes ces qualités réunies en une seule personne. Tous les hommes que j’ai rencontrés m’ont, de fait, toujours rapidement déçue. Ils se sont révélés n’être, à mes yeux, que de pâles copies du premier amour de ma vie. Aucun n’avait assez de qualités pour rivaliser avec lui. Résultat des courses : je suis toujours célibataire ».

Tout cet amour que Tiffany a reçu de son père (et qu’elle lui a rendu) devient pesant pour la jeune femme. « Je commence sérieusement à douter de pouvoir trouver un jour quelqu’un que j’estimerais être à la hauteur de mon père, confie-t-elle. Il m’arrive de penser que mon exigence envers les autres hommes est une façon détournée de lui rester fidèle. Et encore plus depuis qu’il vieillit. Je vois ses faiblesses et j’ai encore plus envie de rester sa petite fille ».

*L’identité a été modifiée

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