Santé

La question psy : « Et si la personne toxique, c’était moi ? »

« On m’a dit que j’étais toxique. Plusieurs de mes ami·es m’ont fait remarquer que je commençais systématiquement des conflits quand nous sommes en groupe », confie Emma*, 31 ans. « Selon eux, je suis incapable de passer une soirée sans monter les gens les un·es contre les autres, chercher les problèmes, attiser la colère », poursuit la jeune femme. « Toxique », un mot brutal à entendre pour Emma, qui ne s’est jamais remise en cause. « Je n’ai jamais eu l’impression d’agacer mes ami·es ou qu’ils avaient quelque chose à me reprocher avant qu’ils me fassent cette remarque », raconte-t-elle. A la question « Est-ce que tu penses qu’ils et elles ont raison ? », elle ne répond pas par la positive. « Je ne pense pas me mêler des choses qui ne me regardent pas. Si je m’interpose dans un conflit, c’est pour aider mes ami·es à régler leurs problèmes », argumente-t-elle. La réalisation que pourrait être une personne toxique est souvent un choc, parce qu’elle touche à notre égo.  

Le déni est donc l’un des fils rouges d’un comportement toxique. Tout comme la victimisation, le dépassement des limites de l’autre, le jugement, l’agressivité passive… Autant de traits de personnalité que l’on présente parfois, séparément ou ensemble, sans forcément en être conscient·es. Qu’est-ce qui déclenche l’introspection chez une personne toxique ? Peut-elle changer ? Sommes-nous foncièrement « toxiques » si nous agissons de la sorte, ou bien s’agit-il de comportements passagers nichés en chacun de nous ?  

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La réponse d’une psy 

Certaines personnes mettent les pieds dans le plat sans être toxiques mais d’autres se nourrissent de diviser les gens. Est-ce dû au bain dans lequel elles ont grandi ? Il arrive que l’on ait besoin de cette violence, car cette part de nous est réprimée. On jette alors le cocktail molotov et regardons les autres s’étriper devant nous. D’autres aiment les drames et l’attention : la vie des personnes toxique est semée de conflits et de crises.  

Le fait de se poser la question est signe que vous n’êtes pas toxique. Les pervers narcissiques ne se remettent absolument pas en question. Ils aiment voir souffrir les autres et n’y voient aucun problème. Ils n’ont aucune conscience de l’autre, sont autocentrés et ne feront jamais de bilan sur leurs relations. Il faut savoir que dans les relations saines, la personne est assez sécurisée pour écouter l’autre, lui répondre, se mettre à l’égalité. Rien n’est imposé. Quand on est toxique, on a un grand égo et des blessures narcissiques. Pourquoi ? Parce que l’on n’a pas eu la sécurité et la notion des limites étant enfant. Ces comportements toxiques ont été appris et banalisés au sein de la famille. En se posant la question, on a alors le choix de valider l’avis ou le rejet de l’autre, ce qui est déjà une grande étape.  

La prise de conscience 

Il va falloir un grand clash, initié par tout un groupe ou un partenaire, pour que la personne s’en rende compte qu’elle a des agissements toxiques. A partir du moment où au moins trois personnes vous reprochent la même chose, peut-être faut-il commencer à considérer que c’est vrai.  

Malheureusement, les grands égos narcissiques ne font pas bon ménage avec la remise en question, la prise de responsabilité et la vulnérabilité. Ils vont plutôt se venger, confronter l’autre ou se victimiser en disant par exemple : « Tout le monde me rejette ». Mise face à ses actions, la personne toxique aura tendance à nier : « ce n’est pas vrai », « ça fait longtemps que j’en ai marre de toi », « je ne veux plus te voir », « on m’a attaqué·e ». L’égo a besoin de défense pour son intégrité. Il faut tout de même graduer le propos : nous avons tous des petits degrés de toxicité en nous, cela ne fait pas de nous des personnes entièrement toxiques. Il y a des pervers narcissiques ou des borderlines qui sont impeccables au travail. D’autres sont fantastiques en famille mais horribles en amitié. La toxicité se manifeste dans les endroits où nous sommes insécurisés et où l’on entre en compétition.  

Faire un bilan de ses relations 

Pour tenter de comprendre si nous sommes toxiques dans nos relations, on peut regarder notre palmarès de relations amicales. Les nombreuses ruptures, les conflits, le chaos et les relations perdues sont de bons indicateurs. Nos relations représentent-elles un champ de bataille ou plutôt un schéma paisible et évolutif ? Par exemple, il arrive de faire des mises à jour amicales, mais il faut veiller à ce qu’elles se fassent dans la bienveillance et avec des accords communs. Si toutes nos relations se terminent en conflits non résolus, parsemées de reproches que l’on ne comprend pas, on peut se poser la question. L’incompréhension du conflit nous rend aveugles à ses bienfaits. La dispute est importante : c’est ce qui nous rend vrai·e. Dans une vie, on va forcément blesser quelqu’un que l’on aime, mais il faut pouvoir le dire.  

Mieux comprendre nos émotions 

On peut changer. Il y a suffisamment de thérapie, de livres, de podcasts pour s’éduquer. Et puis, en parler à ses amis proches : « Tu sais plein de gens me reprochent de créer toujours des conflits, j’ai envie de les écouter ». Ces angles morts peuvent être abordés avec des amis qui nous aiment et ne vont pas nous rejeter. Parler, s’exprimer, se laisser traverser par tous ces ressentis est primordial. Les émotions s’apprennent et se vivent, et souvent on ne les a pas intégrées en grandissant. « Est-ce que je suis à l’aise avec toutes les émotions ? », « Quelles émotions étaient taboues dans ma famille ? » sont des questions que l’on peut se poser. La vulnérabilité est un concept compliqué quand on ne sait pas dans quoi on s’engouffre ! 

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